jeudi 25 août 2011

Quelques mots pour conclure

L'Inde me laissera un souvenir assez contradictoire. D'un côté, l'émerveillement pour cette culture très riche, du film Bollywood à la cuisine épicée en passant par le foisonnement de monuments religieux et de couleurs, l'Inde est un modèle culturel fascinant. De l'autre, cette même culture qui mène à des situations qui pour moi sont parfois abbérantes. Notamment, ce qui me laisse assez dubitative et pessimiste sur l'évolution de l'Inde, c'est le système de caste qui régit encore toute la société indienne et qui légitime la pauvreté, en insinuant notamment que si l'on est pauvre (et intouchable, souvent de pair), c'est qu'on a fait de la merde dans sa vie précédente, et que donc on l'a amplement mérité. Cette vie là ne sert alors que pour espérer en avoir une meilleure dans la réincarnation suivante. Quelle politique anti-pauvreté mener alors face à cette justification de la situation économique et sociale? Un autre problème plus que préoccupant pour l'Inde de demain c'est sa surpopulation et son manque de femmes, ce qui va finir par poser de sérieux ennuis à un moment ou à un autre. L'Inde, c'est un pays difficile. Difficile à vivre, à comprendre, à suivre. Mais facile à aimer malgré tout.
Mon stage aura aussi été très important pour moi. J'en ai beaucoup appris sur l'Inde rurale et sur le milieu de la recherche. Ca m'a confirmée dans l'idée que je n'ai pas envie de faire de la recherche plus tard (du moins je n'ai pas envie que ça devienne mon activité numéro un) car je manque de patience, de précision, de conviction dans l'utilité de certaines recherches pour faire ce métier. Cependant c'est important que des laboratoires comme le CSH existent afin de permettre aux politiques d'en savoir plus avant de prendre certaines mesures.
Merci à ceux qui m'ont suivis pendant ces 4 mois, les commentaires sur ce blog se font très rares mais j'ai reçu beaucoup d'emails et ça m'a fait grand plaisir!

Fin du voyage

Je viens de me rendre compte que je n'avais pas fini de vous raconter notre road trip en Inde. Après un peu plus de 20h de transport, nous sommes arrivés à Darjeeling, ville connue pour son thé. Il pleuvait beaucoup et la ville était constamment dans le brouillard, ce qui donnait une ambiance glauque à mourrir. Après une visite dans une plantation de thé où j'ai appris plein de choses intéressantes sur cette boisson, on a décidé d'écourter notre séjour à Darjeeling et on est partis direction Calcutta.
Calcutta, c'est l'Inde dans toute sa complexité et sa contradiction. De magnifiques bâtiments (certains de l'Empire colonial), une petite tranche de la population qui passe ses week-ends dans les mall, et une grosse majorité qui vit dans la pauvreté. A Calcutta, il y a mendiant (souvent avec des membres en moins) tous les quelques mètres, et souvent (plus qu'ailleurs en Inde j'ai trouvé) ce sont des enfants. On voit encore des rickshaws (pousse-pousse) tirés à force d'Homme (ce qui est interdit dans le reste de l'Inde, car la différence entre l'Homme et l'animal devient alors vraiment ténue). Le gouvernement indien souhaiterait les voire disparaître, mais ils reflètent quelque chose de bien pire: le chômage est tel et le travail d'un Homme vaut si peu cher qu'à choisir entre une âne (ou un cheval) pour tirer le rickshaw et un Homme, la solution la moins chère est l'Homme. Les rues sont très sales et il y a énormément de monde, et ce qui m'a choquée c'est qu'il n'y avait quasiment que des hommes. Pour la énième fois je me suis demandée "mais où sont les femmes?". A la maison certainement. Il faut rajouter à cela une pluie torrentielle, les rues inondées et un rassemblement politique bruyant, et vous aurez un aperçu de ces quelques jours que j'ai passé à Calcutta.

Dernière étape: Varanasi, haut lieu de pèlerinage hindou. Les hindous viennent ici bruler les corps de leurs morts (quand ils ont les moyens de les transporter jusqu'ici), ou jeter les cendres dans le Gange. 24h/24 les buchers à ciel ouverts fument dans toute la ville. Dans les petites ruelles piétonnes de la ville où l'on croise plus de vaches et de rats que d'humains, on voit des convois déambuler vers le Gange avec sur l'épaule leur mort recouvert de bandes blanches. Les touristes aussi peuvent assister au bucher mais je n'y suis pas restée longtemps, j'étais pas à l'aise. Les corps sont brûlés puis jetés dans le Gange sauf les enfants de moins de 10 ans, les femmes enceintes, les personnes piquées par un serpent (animal de Shiva) et les vaches qui eux sont directement jetés dans le Gange sans crémation aucune. Le Gange, c'est aussi le fleuve le plus pollué au monde et là où tous les pèlerins se baignent, sous l’œil un peu dégouté des touristes. Malgré le récit que je viens de vous faire de cette ville, il s'en dégage une atmosphère spirituelle bien plus conviviale qu'on pourrait le croire. Il y a beaucoup de pèlerins, de musique, de chants, de cérémonies, de couleurs...Tout un paradoxe. Avec Matthieu on est rentrés à Delhi das un train où l'on avait pas de place (mais on n'avait pas le choix, l'avion ne nous attendrait pas), qui était bondé, et où on a du dormir par terre. Voyage éprouvant et marquant, mais tout est bien qui finit bien et on a eu notre avion à l'heure.